LE PEN PRÉSIDENTE : LES MARCHÉS DOIVENT-ILS SE PRÉPARER À L'IMPENSABLE ?
L’éventualité d’une présidence Le Pen a commencé à mettre les marchés sous pression. L'analyse de Samy Chaar et Stéphane Monier, respectivement chef économiste et responsable des investissements à la banque Lombard Odier.
Hantés par le Brexit et la victoire inattendue de Donald Trump, les marchés ont tiré les leçons de leur complaisance ces derniers mois pour accorder l’attention requise aux futures élections présidentielles en France.
L’écart de rendement entre les obligations gouvernementales françaises et allemandes à 10 ans ayant atteint son plus haut niveau depuis presque trois ans, le marché se méfie clairement des conséquences économiques d’une victoire de Marine Le Pen.
Alors qu’Emmanuel Macron se dispute la première place dans les sondages avec Marine Le Pen, le risque d’une victoire du Front National à l’élection présidentielle est, selon nous, faible mais demeure néanmoins bien réel.
Et si cela arrivait? Les perspectives d’une présidence Le Pen
Surfant sur la vague des eurosceptiques et le courant protectionniste, l’éventualité d’une présidence Le Pen a commencé à mettre les marchés sous pression.
Les mesures clés du parti comprenant la sortie de la France de la zone euro et la tenue d’un référendum sur l’adhésion à l’Union européenne, une victoire du Front National pourrait bien menacer la survie du projet européen à long terme, tandis qu’à court terme, elle pourrait mettre à mal la reprise de la région.
Malgré le large soutien dont bénéficie l’extrême droite dans le pays, Marine Le Pen reste à la merci d’un deuxième tour qu’elle a très peu de chances de remporter.
La candidate devrait en fin de compte être pénalisée par son discours radical, forçant l’opposition à s’unir contre elle.
Dans l’intervalle, en tant que nation d’épargnants, le peuple français risque de ne pas voir d’un bon œil la conversion des euros en francs, qui mettrait en péril une reprise économique obtenue de haute lutte.
Reprise économique: perdue dans la politique
La fébrilité caractérisant l’environnement politique actuel met en péril l’évolution conjoncturelle par ailleurs positive de la région.
L’économie de la zone euro ne s’était pas aussi bien portée depuis près d’une décennie, la plupart des nouvelles données indiquant une reprise soutenue[1].
En théorie, cet environnement devrait favoriser un resserrement des écarts de rendement des obligations. Dans les faits, ils augmentent pourtant, l’effervescence politique semblant éclipser les bonnes nouvelles qui devraient ravir les investisseurs.
Bien qu’une victoire du Front National ne soit pas prise en compte dans notre scénario de base, les investisseurs seraient bien avisés d’envisager l’impensable.
En cas de victoire de Marine Le Pen, les actifs français seraient certainement vendus par les investisseurs internationaux car les incertitudes concernant la mise en œuvre des politiques du Front National pourraient s’avérer dangereuses, notamment en ce qui concerne la conversion des actifs en euros en actifs en francs français.
Il convient de signaler qu’un système monétaire dual (franc/euro) n’a jamais fonctionné par le passé.
Les fondamentaux du nouveau franc et de l’euro ne seraient pas considérés comme équivalents.
La monnaie perçue comme la plus forte des deux (l’euro) sera thésaurisée, tandis que la monnaie la plus faible (le franc) sera dépensée et perdra de la valeur, empêchant la Banque de France de maintenir un quelconque ancrage.
Brexit: l’élément dissuasif improbable
Une sortie de la France de la zone euro pourrait forcer les investisseurs à augmenter les primes de risque sur l’euro et sur les actifs en euros de manière générale.
Parallèlement, un euro sans la France ne manquerait pas de remettre en question l’avenir de la monnaie unique.
De même, un référendum sur l’adhésion de la France à l’Union monétaire européenne déclencherait une crise existentielle d’une ampleur plus grande encore que le Brexit.
Le sondage d’Eurobaromètre sur le soutien à l’euro indiquait en octobre dernier que 65% des Français étaient en faveur d’un maintien de l’euro en cas de référendum[2].
Cela dit, nous pensons que la concrétisation du Brexit rend justement un «Frexit» moins probable.
Le chaos administratif, le casse-tête juridique et les failles sociales dévoilées par la décision du Royaume-Uni de quitter la zone euro pourraient dissuader les autres Etats membres de s’engager dans la même voie.
Nous ne pensons toutefois pas en arriver à cette extrémité car la nature du système électoral français rend une victoire de Marine Le Pen improbable.
Refléter les incertitudes électorales dans les portefeuilles
La valorisation des actifs européens reflète actuellement les risques d’une année politique chargée[3], et des résultats électoraux favorables pourraient supprimer une grande partie de la décote européenne.
Compte tenu de l’environnement macroéconomique favorable et de la dynamique bénéficiaire positive, nous pensons que de solides opportunités d’achat se présenteront et avons commencé à réduire notre sous-pondération des actions européennes.
Nous estimons qu’il est judicieux de maintenir la légère surpondération du niveau général de risque des portefeuilles et avons introduit certaines couvertures, en prévision d’une possible volatilité avant les élections qui pourraient déterminer l’avenir de la monnaie unique.
Nous pensons que le franc suisse est intéressant pour couvrir le risque politique européen.
Selon nous, il constitue un placement refuge plus naturel que l’or ou les bons du Trésor américain si les investisseurs ont des inquiétudes concernant la monnaie unique.
SOURCE : BILAN 20.03.2017
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