LES 4 VÉRITÉS DE BRANE

LES 4 VÉRITÉS DE BRANE

JUSQU'À QUAND AURONS-NOUS PEUR APRÈS LES ATTENTATS DU 13 NOVEMBRE

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ATTENTATS - En entrant dans le métro, d'ordinaire, personne ne lève la tête de son portable, de son livre ou de son journal. Depuis vendredi soir, nous prêtons un peu plus attention aux personnes qui nous entourent. Ouf! La personne qui vient d'entrer dans la rame n'est pas un kamikaze. Car oui, désormais, nous pensons avoir le pouvoir de distinguer un terroriste d'une personne normale d'un simple coup d'œil en nous basant sur des critères aussi peu fiables que le physique et l'habillement.
Peur d'une ampoule qui casse, des travaux du voisin qu'on prend pour un bombardement, des voitures aux vitres teintées qui passent dans la rue, l'ambiance est assez pesante depuis les attentats. Aussi surement qu'une résistance d'un nouveau genre s'est installée à la terrasse des bars pour célébrer l'art de vivre à la Française, la peur s'est aussi invitée dans nos ventres, au fond de nos gorges. La peur de l'autre, de la mort, de la fin de l'insouciance. Jusqu'à quand cette peur va perdurer?

Première étape, accepter sa peur

Pour faire face à sa peur, plusieurs stratégies existent, parmi lesquelles la plus militante, la négation, largement relayée sur les réseaux sociaux avec des slogans comme "Même pas peur!". Une stratégie qui a ses limites: "Nous avons toutes les raisons d’avoir peur, affirme avec force et conviction Olivier Douville interrogé dansPsychologies. Dans ce 'nous n’avons pas peur', il y a une part de déni, ainsi qu’une croyance un peu magique que ce n’était qu’un cauchemar, maintenant terminé".
Or, sur ce point, la psychologie est formelle. Pour ne pas se retrouver paralysé par la peur, mieux vaut l'accepter. "Renier ses peurs, c'est se renier soi-même. Les accepter, c'est la meilleure façon de s'en délivrer", écrit ainsi le psychologue Robert Zuili dans son ouvrage Comprendre les émotions de ses enfants. Ce qui vaut pour les enfants, vaut aussi pour les adultes.

Deuxième étape, partager sa peur

Dans notre cas, outre le fait d'accepter notre peur, la partager avec les autres peut être salutaire, comme l'explique Andreea Ernst-Vintila, docteure en psychologie sociale interrogée sur Le Plus: "D’une part, le sentiment de peur se diffuse via les réseaux rapidement et s’y trouve ainsi renforcé, ou plutôt légitimé, car partagé socialement. D’autre part, c’est ce même partage social qui rend la peur supportable, permettant de la conjurer."
Le texte publié par la romancière et journaliste Titiou Lecoq le 17 novembre est en ce sens salvateur. Elle n'a perdu personne dans les attentats, ne se trouvait pas sur place dans la nuit de vendredi à samedi, et pourtant son malaise la paralyse. "On a le droit. D’être enragé, en larmes, vidé. On a le droit d’être traumatisé sans avoir eu de contact direct avec les attaques. Tous. Y compris ceux qui n’étaient pas là, pas là aux terrasses ou au Bataclan, pas là à Paris, pas là en France. Ceux qui vivent en province, ceux qui étaient/sont à l’étranger. C’est quelque chose de plus fort. Un noyau chaud qui vous fait sentir que vous aussi vous avez été ciblés. On n’est pas traumatisés pour rien mais parce qu’on a été attaqués. Et pas symboliquement. C’est extrêmement concret ce qu’on vit. (Il suffit de prêter attention aux sirènes qui retentissent désormais en permanence.) Ceux qui sont traumatisés, le sont parce qu’ils savent, ils sentent intimement qu’ils étaient visés. Et c’est une raison suffisante pour être en état de choc".
Dans les nombreux commentaires qui accompagnent ce témoignage, les lecteurs qui ne sont pas tous des habitués du blog de Titiou Lecoq la remercient pêle-mêle "d’avoir mis des mots sur ce que je ressens", pour "ces mots qui font vraiment du bien", ou encore "de savoir que je ne suis pas seule".

Troisième étape, nous faire confiance

Dans les jours qui ont suivi les attentats de 1995 dans le métro parisien, l'affluence a baissé de 7 à 8%. Après le 13 novembre selon francetv info, la RATP a constaté une baisse "légèrement inférieure à 10%" sur son réseau ferré (métro et RER) avec "un phénomène plus marqué sur les stations touristiques". Depuis le début de la semaine, les habitants de la région parisienne ont été plus nombreux à privilégier la voiture, et les embouteillages ont logiquement augmenté. Progressivement, la situation semble s'améliorer.
Selon le directeur du département Opinion à l'Ifop, Jérôme Fouquet, interrogé par Mle magazine du Monde, la peur dans de telles circonstances ne changerait pas nos comportements quotidiens mais "susciterait des attentes beaucoup plus fortes envers les gouvernants". Dorothée Marchand, chercheure en psychologie sociale et environnementale au CSTB, interrogée par Le HuffPost va aussi dans ce sens.
Pour cette spécialiste qui a étudié des catastrophes naturelles et le cas de certaines villes détruites pendant la Seconde Guerre mondiale puis reconstruites, pour que la peur commence à s'estomper, trois paramètres sont à prendre en compte. Le premier concerne le risque de voir se reproduire très rapidement un nouvel attentat terroriste. Un risque très présent dans les esprits aujourd'hui encore, surtout après les déclarations de Manuel Valls sur de possibles attaques chimiques. En parlant des politiques justement, la capacité des institutions et des politiques à faire face à ce genre de situation est le deuxième facteur susceptible de nous rassurer. Le troisième sur lequel nous pouvons directement agir est plus surprenant.
"Notre attachement au lieu attaqué va favoriser le fait de pouvoir dépasser sa peur, explique Dorothée Marchand. C'est un instrument, un support qui va nous permettre de passer de la peur à autre chose. C'est parce qu'il y a un attachement fort à Paris et aux valeurs universelles portées par la Capitale et par les lieux qui ont été attaqués que l'on peut passer à autre chose. C'est d'ailleurs cet attachement qui explique déjà qu'on soit en train de passer à autre chose. " Que l'on soit à Paris, à Marseille ou ailleurs dans le monde, retourner à la terrasse d'un café, c'est donc affronter sa peur, la dompter et la transformer en autre chose.

 

SOURCE : LE HUFFINGTON POST 21.11.2015



21/11/2015
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